Tuesday, October 2, 2007

Michel Cosem

né à Tunis en 1939. Etudes de lettres et de sciences
politiques à Toulouse..
1960 : fondation de la revue ENCRES VIVES.
1965 et années suivantes : documentaliste en Lycée
1967 - 1987 : responsable national du secteur poésie - écriture au Groupe
Français d'Education Nouvelle ( GFEN ).
1969 : naissance de son fils
1974 - 1980 : directeur de la collection " Découvrir " aux Editions Seghers.
1975 : naissance de sa fille
1986 : voyage en Afrique noire
1988 : - fondation de Escalasud / colloque des Poètes du Sud.
- découverte de l'Andalousie.

Poèmes

LE TEMPS DES SEVES ( Encres Vives,1967 ) LE GIVRE ET LA RAISON
(Encres Vives,1968) FRUITS ET OISEAUX DES MAGIES (Encres vives,1972)
TERRITOIRE DU MULTIPLE (Editeurs français réunis,77) TRAFIQUANT DE
PAROLES (Tribu,1982) ARBRE LOUP (L'Ecole,1985) AUX YEUX DE LA
LEGENDE (Bedou,1986) RECIT D'UNE BRUME (Encres Vives,1986) MAL-
GRE LA SECHERESSE (Editions de midi,1987) PRISE DE VENT (Océane,1987)
LA LANGUE DE BARBARIE (Bedou,1989) REVERIE DU JOUR ( L'Arbre à
Paroles, 1991) ANDALUCIA (Encres Vives,1991) EXPLICATION DE L'ETER-
NITE (Rougerie,1991) LE JARDIN DE LA DANSE (Encres Vives, 1992) LE
PETIT JOUR (Sud, 1993) Prix Malrieu 93 L'ÎLE EN POINTILLE (Océane, 1993)
HAUTE LANDE ( Fondamente/ Multiples, 1993) CARREFOUR DES SAUVAGI-
NES (Autres Temps, 1993) JARDINS INTERIEURS ( Rougerie, 1994) ADIEU AUX
EPHEMERES ( Encres Vives, 1995) PAYS D'ARGILE (La Bartavelle, 1996) SIER-
RA MAUVE, LE MATIN ( Cadratins, 1996) L'ILE VEUVE (Encres Vives, 1997)
IMAGES AU COEUR ROUX ( L'Amourier, 1997) GIBOULEES DE NEIGE ET
D'OISEAUX ( Lo Païs, 1997) LIEU ULTIME (Rougerie, 1997) SONGES ET
GRAINS D'ILES ( Océanes, à paraître)


Anthologies de poésie :


DECOUVRIR LA POESIE FRANCAISE (Seghers,1975) LE LIVRE D'OR DE
L'OCCITANIE (Seghers,1977) LA MONTAGNE EN POESIE (Gallimard,1980)
DESNOS UN POETE (Gallimard,1980) AU PAYS DES MILLE MOTS (Milan,
1988)

Etude de l'oeuvre

MICHEL COSEM par Jean Marie LE SIDANER (collection "Visage de ce Temps",
Editions du Rouergue,1992 )

Distinctions littéraires


- Prix Loisirs- Jeunes 1975 : DECOUVRIR LA POESIE FRANCAISE
- Prix de la ville de Vénissieux 1980 : ALPHA DE LA LICORNE
- Prix Méridien 1981 : LA DERIVE DES CONTINENTS
- Prix Artaud 1986 : AUX YEUX DE LA LEGENDE
- Prix Enfance / Midi-Pyrénées 1986 : LES TRACES SAUVAGES DE L'ESTELAS


***


Elle était là dans le pré mouillé

l'inconnue à l'écorce bleue

fatiguée d'un très long voyage

pleine de tiges et de fleuves



J'ai mis ma clé dans la neige

et j'ai parlé à la tombée du jour

j'ai raconté une histoire d'orage

et elle n'a rien compris

prise telle une croix de granit

dans une folie secrète

tel un pays abandonné par l'aube



Elle était là dans le pré mouillé

l'inconnue à l'écorce bleue.

°°°°°°°°°°

La pluie a suspendu sa tragédie d'oiseau

elle a ouvert la nuit

au large de la plaine

elle a parlé du désir

et de la poussière



Elle a récolté les frontières



Juste ce soir

comme une femme

dans un ciel cruellement absent.


°°°°°°°°°°

Juste cette rencontre

à la frontière de l'arbre

simple racine où passe le ciel

terres rouges et blanches mélangées

couleur d'éveil

et coeur de passion



Arche au champ des tempêtes

incandescence près d'une maison ouverte

vigne très mûre

et geste fraternel du seuil



Voici donc le passage furtif

lorsque mon pas reposé

adoucit le buisson.

°°°°°°°°°°

Siècle d'oiseau

mémoire bleue

toi et tes ailes trop longues

palombe veuve

venue boire à la source



Pour quel rendez-vous de blé

pour quel papillon de nuit

es-tu là

près de la fumée bleue



Quel sens donner à ta mort ?

°°°°°°°°°°

Contre le ciel noir

orage et vent de dérive

rêverie cristalline

simplement penchée

incertaine encore

goûtant la lumière

telle ta robe de laine

cible et recueil de mer



Par ce geste de printemps fou

pour ce théâtre solitaire

cette seule promesse de vengeance



la branche du prunier en fleur.

°°°°°°°°°°

Il est l'heure enfin

de rassembler l'écume

de lier les coïncidences



l'heure de l'astre égorgé

près de la porte

fermée par la pluie



l'heure transparente

du silex et de la poussière



l'heure de la quête

sur le chemin d'épine

non loin du double

et de la frontière



il est l'heure enfin

de rassembler l'écume

de lier les coïncidences.

°°°°°°°°°°

Je t'appelle du fond de l'hiver

dans la noire blancheur du silence

dans l'écorce retournée en cendre



Tu n'as plus le pouvoir d'appeler le printemps

les oiseaux

et les gorges de feuillage

tes mots n'ont plus ailes

tes fleurs désormais sont vénéneuses

tes racines ont noirci

tes laines abandonnées aux ronces

sont les débris du givre


Et pourtant

je t'appelle du fond de l'hiver.

°°°°°°°°°°

Au fond de la rue bleue

encore humide

comme une aile pour mourir

comme un dernier mot d'amour


Une perle

un tison

et les prunelles éteintes

là sur les dalles où la poussière s'amoncelle


Jusqu'à l'aube j'ai mis mon ombre

dans le rêve des murs

dans mes creux de falaise


Et une note glisse


L'encre est aussi naufragée qu'une île.

°°°°°°°°°°

Quel oiseau étonné

à cette heure rencontre

la brûlure noire de la forêt


Toutes les peurs sont identiques

couleur de paille

ou écaille de serpent


Tous les départs

pèsent sur la chair

froides hantises et murmures


Est-ce cela la solitude du soir ?


A la lisière

une feuille juste lancée

cherche l'origine du vent

°°°°°°°°°°

Ce ciel cette plénitude

cette ligne vieille

ces montagnes noires

en marche vers l'inconnu des mondes


Hommes fragiles

arbres aux fleurs roses

gestes de cette nuit livrée aux chimères

crainte d'enfant à l'aplomb du vertige


Soleil rond.


Poèmes extraits de " POEMES INEDITS " Editions du Rouergue, 1992

°°°°°°°°°°

JOURNEE DE VENT

Entre les blocs de lave les cactus les lotus les dragonniers aux
doigts familiers les figuiers de barbarie et d'ailleurs, entre les
fleurs de Noël et les pâles pâquerettes, alors que la chevelure
des poivriers virevolte
alors que les vêtements légers se collent au corps des jeunes
filles
le vent fou fait hurler les épines, gronder les murs, projetant sa
colère dans les arcs-en-ciel et les hibiscus éparpillant la précieuse
terre rouge, approfondissant les canyons sauvages

DANS LE NOIR FICUS

Dans le noir ficus au seuil du soir quand le soleil se marie avec
l'océan et que les lourds nuages se confondent avec les îles
fantômes
les moineaux reviennent pour la nuit
de branche en branche de feuille en feuille ils disent la dure
journée de vent pesant aux ailes la pitance légère
ils disent les amis disparus dans le ventre des chats
ils disent qu'il n'est pas temps encore de reconstruire les nids au
bout des toits près des bougainvillées jaunes
ils disent ils disent qu'il est bon de s'endormir
(San Miguel de Abona )

LOS GIGANTES

Les rochers sont plantés dans le tumulte de l'océan alors que
l'écume laboure la plage noire et que les galets jaillissent dans
une gigantesque bataille
Seul le soleil cerclé respire au milieu de la tempête
Les petites maisons blanches des hommes s'éloignent comme des
crabes et la haute falaise tel un immense poulpe ouvre au large
sa gueule

OBISCO

Le poisson aux écailles rouges à la gueule effrayante ouverte
hurlant dans l'huile brûlante de Taganana son départ brutal et
métallique de l'océan

Sur ma table, tandis que sans cesse l'océan se dresse au-delà de
la fenêtre, entre deux gorgées de vin rosé et des falaises bleues
pleines de mouettes folles, passe un rayon de soleil
et le chant canarien parle des routes vertigineuses et de la brume

Je n'ai pas oublié les petites pommes de terres cuites dans l'eau
de mer

ALMACIJA

Un bouquet de maisons blanches
Deux perruches vertes et bleues se disputent la place en pente
Palmiers et dragonniers hésitent. Il y a à l'intérieur du village
des élans quotidiens, des appels, des sourires, des attentes, des
appels, des travaux infinis

Juste au-dessous des nuages aimables et ronds
Au-dessus de la falaise (avec quelques aloes) et (encore plus bas)
des îlots noirs où se rue l'océan dans le grand remuement
funambule et craquelé qui fait croire à la nouvelle planète

FORET DE LAS MERCEDES

Comme une bête à la peau sombre, épouse légendaire de
l'énorme montagne, avec ses colliers de fleurs blanches et ses
soifs de soir
ce goût d'océan qui ne cesse d'engloutir la gorge
elle attend pour consommer la nuit

Un faucon aux ailes tremblantes demeure incertain
incapable de percer la toison
de feuilles
et de tiges

Poèmes extraits de RAPSODIE DE LAVE ET D'EMBRUNS
( Collection Lieu, Encres Vives , 1998 )